Mémoire noire...
Je m’appelais Aram...
J’étais un enfant
sage avec ses rires’, ses larmes.
J’habitais dans la
Paix entre mes frères’, mes sœurs...
Nos parents nous
aimaient, je crois, de tout leur cœur !
Du fond de leur pudeur,
ils exprimaient leur Foi...
On vivait le
bonheur à l’abri, sous leur toit.
Les gens
habitaient là, tout près de la rivière
Et l’air était si
pur et l’eau était si claire !
On s’y baignait
nombreux, les vagues’ étaient si bleues
Ou cuivrées de
soleil sous le ciel silencieux.
Tous les jours
étaient calmes’ au cœur de la forêt
Qui nous confiait
son âme où la nature’ chantait...
On rentrait pour
manger des plats pleins de délices
Que maman
préparait. On se sentait complices !
Maman nous avait
dit que dans son ventre rond
La
famille’ grandirait... pour bénir la maison !
On avait bien
compris qu’on serait « un de plus »
A se mouiller dans
l’herbe, après qu’il aurait plu !
C’était avant
l’orage, avant la pluie de rage
Qui soudain est
tombée parmi tous ces ravages !
On cherchait du
courage en courant droit devant...
C’était comme un
naufrage ! On cherchait nos parents !
J’entends
encore’ maman pleurer entre les rires
Des soldats qui
l’ont prise et qui l’ont fait souffrir !
J’étais juste caché,
là-bas, derrière’ l’étable
Et je faisais le
mort, allongé sur le sable,
Pas très loin des
civils qu’on avait massacrés !
J’ai quitté mon
repaire et j’ai rouvert les yeux
Après les
dernières’ salves’ ou les tirs apaisés.
Plus tard j’ai
vu mon père... et son corps supplicié !
C’est là que j’ai
hurlé ! et les torrents de larmes
Que j’ai versés
alors coulent’ encore’ dans mon âme !
J’ai vu les murs
en ruine et les toits dévastés !
Le village
incendié, des enfants mutilés !
Des rideaux de
fumées sur du torchis brûlé
Et des lambeaux de
chair sur le sol calciné !
Je n’ai pas vu s’éteindre’ le dernier des regards
Je n’ai pas vu s’éteindre’ le dernier des regards
Qui m’étaient
familiers mais j’ai vu s’embraser
Ceux des « vampires’ cruels » qui ont meurtri nos vies,
Acharnés à tuer... sans répit ni merci !
J’ai soufflé du silence’ pour étouffer mes cris...
Et l’enfant sage en moi a croisé la Folie !
Et l’enfant sage en moi a croisé la Folie !
Puis le soir est
tombé, après la barbarie,
Les bourreaux repartis et la terreur enfuie...
Il restait la
misère et la mer de douleur ;
Restaient
l’instinct de guerre’, les rumeurs de malheur...
Moi j’étais
orphelin et le seul rescapé
De ma famille
entière’... j’étais comme amputé !
Je
m’appelais Aram...
J’ai
marché si longtemps sous les volcans, sans bruit,
Pour
ne pas y tomber... pour rester à l’abri...
Je
m’appelais Aram...
J’ai
le cœur plein d’espoir !
J’ai le cœur plein d’espoir...
J’ai le cœur plein d’espoir...
Mais
mon miroir est noir !
Plus un seul
habitant ! non ! plus une âme’ qui bouge !
Par tout le sang
versé, la rivière était rouge !
Et j’étais à côté...
J’ai failli m’y jeter !
Sans rien pouvoir
penser, j’étais désemparé
Lorsque j’ai pu
lancer un appel au secours
Venu de mes
entrailles’ ou de mon cœur très lourd !
Puisqu’aucune ONG
n’a entendu ma plainte,
Alors j’ai dû marcher en affrontant mes craintes !
La forêt, le
désert, j’ai cru les traverser
Lorsque des
chameliers ont pu me relever.
La mer fut aussi bleue que mon passé trop loin
Quand j’ai pris ce
bateau pour un destin lointain...
Il me restait si
peu de monnaie dans la caisse
Que j’avais
emportée mais j’avais ma « richesse » :
Toute’ l’ardeur de mon
cœur et puis, tant de fureur !
Oui ! cette’ fureur de
vivre et de vaincre ma peur
Pour que depuis
le Ciel ma famille’ me voie fort
A travers mes
efforts, la venger de sa mort !
La mort, je l’aurai vue souiller mon horizon
La mort, je l’aurai vue souiller mon horizon
Sans vouloir lui
donner un seul instant raison !
Sur des rafiots pourris qui repartaient à vide,
Sur des rafiots pourris qui repartaient à vide,
Bien sûr, j’étais livré
à des passeurs avides !
J’ai résisté
encore’ parmi tant de victimes
Noyées dans leur sillage ou broyées par leur crime :
Noyées dans leur sillage ou broyées par leur crime :
On a croisé des
coques’ et des corps échoués !
Enfin, j’ai
rencontré toute une’ foule’ naufragée
Dans un camp de
passage, entre des barbelés
Et des ombres’ éclatées, dans des centres’ isolés
Où j’ai dû partager trop de sanglots brisés
Contre des murs de
fer, dans des prières’ brimées !
Je me suis
échappé sans que je me retourne,
Vu qu’on ne sait
jamais si c’est la chance’ qui tourne !
... ... ... On m’a cité mes
droits en tant que réfugié...
Un statut
accordé : « simple formalité ? »...
J’ai droit à des
papiers, à une identité
Toute’ nouvelle et toute’ fraîche... A ma citoyenne’té !
Je suis chez moi,
en France, et ma vie recommence ?!!!
Pourtant je
n’oublie rien d’un million de souffrances !
Non !!! ni l’absence’ des
miens perdus sur mon chemin,
La peur des lendemains, ni mes rêves’ incertains !
Et toutes’ ces vies
ôtées, j’y repense’rai souvent :
Ma rivière’ « d’à
côté »... mes frères’ et mes parents !
J’ai vu tant de
tombeaux... des bombes’ et tant de flammes ;
Les couteaux des
bouchers qui tranchent’ et qui condamnent !
Je n’étais qu’un
enfant parmi des hommes’, des femmes...
Je me souviens de tout... des ventres qu’on affame
Et des tribus
entières’ passées sous les machettes !
Des humains qu’on
achète’, des gamins qu’on maltraite,
Entraînés à tirer
Sans faire aucun
quartier !
Je
m’appelais Aram...
J’ai
marché si longtemps sous les volcans... sans bruit,
Pour
ne pas réveiller la violence ennemie...
Je
m’appelais Aram...
Et
ma mémoire est noire !
Et ma mémoire est noire...
Et ma mémoire est noire...
Mais mon cœur, plein d’espoir !
Je pourrais fondre
en larmes’ et parfois ça m’arrive :
Je sombre et ça m’désarme ou bien ça me ravive !
Ça me soulage un
peu mais ça ne change’ra rien !
Je peux faire’ des
cauche’mars.que j’oublie le matin.
Je pense à ces
gourous, ces guerres’ venues d’ailleurs
Qui ont volé ma
terre ou violé son bonheur !
Je
m’appelais Aram
Et
j’ai vécu ce drame !
Mainte’nant
je peux rêver
Si j’ai assez pleuré !
Si j’ai assez pleuré !
Mais
ça, c’était avant
Ou
dans une autre vie...
Car
me voilà marchand
Dans
les rues de Paris !
J’vends
les bijoux « Armand »...
Je
suis devenu grand !
Sans devenir un roi,
Je suis devenu... moi !
Et je vis mon histoire
Sans devenir un roi,
Je suis devenu... moi !
Et je vis mon histoire
Avec tell’ment d’espoirs !
Avec tell’ment d’espoirs,